mardi 13 avril 2010

Avant-propos

Le Tea Party est un mouvement politique conservateur né aux Etats-Unis en début de l’année 2009, suite à l’annonce par le Président Obama de l’ « Economic Stimulus Package ». Selon certains observateurs, son émergence et son succès seraient intimement liée à l’utilisation des « nouveaux médias». Les membres du Tea Party et ses défenseurs basent, quant à eux, une grande partie de leur discours anti-establishment sur la critique des médias traditionnels. La « vraie information », selon eux, émane des « nouveaux médias », symboles du mouvement citoyen spontané qu’ils disent incarner.

Dans cette étude, nous tenterons de soumettre ses affirmations à une analyse comparative. Nous nous comparerons un corpus de médias « mainstream » à une sélection de « nouveaux médias » pour voir si ces derniers ont véritablement propulsé le Tea Party sur le devant des scènes politique et médiatique. D’un autre côté, les médias traditionnels ont-ils réellement ignoré le mouvement à ses débuts ? Lui ont-ils réservé un traitement négativement biaisé ? Le sens commun laisse penser que les médias traditionnels et les « nouveaux médias » ne traitent pas les mêmes sujets. Il suggère également que les sujets « d’avant-garde » naissent uniquement sur la Toile avant d’arriver à maturité dans les vecteurs d’information traditionnels.

Pour ce faire, nous allons étudier la façon dont six médias ciblés ont traité quatre événements clé du mouvement. Nous avons sélectionné ces médias en fonction de leur importance en terme d’audience, de l’accès à leurs archives, de leur lien avec le sujet en question et de leur capacité à apporter une diversité politique au corpus.

Nous aimerions enfin, au long de ce travail, garder en tête une précaution méthodologique. Notre but est d'analyser de façon critique la manière dont s'organisent les informations, non d'épouser les propos des auteurs cités.

Chronologie

Février 2009 :

Du 10 au 18 février :

Quelques protestations en Floride, en Arizona, à Seattle et à Denver contre le « Economic Stimulus Package ».

Le 19 février :

Rick Santelli, journaliste financier de CNBC, propose en direct une « tea party » pour protester contre le plan de refinancement des hypothèques du gouvernement.

Du 27 au 28 février :

Le mouvement se nomme désormais « Tea Party ». Près de 50 manifestations se tiennent dans tout le pays durant ces deux jours.

Mars 2009

Du 6 au 8 mars :

Manifestations dans le pays pour protester contre le « Economic Stimulus Package », mais également contre les dépenses de l’Etat et les impôts.

Du 12 au 14 mars :

Les réunions de citoyens se poursuivent dans le pays. Plusieurs milliers de personnes à Cincinnati, le 14 mars.

Le 21 mars :

Plus de 4'000 personnes se réunissent à Orlando pour exprimer le mécontentement face à Washington.

Avril 2009

Du 1 au 11 avril :

Les manifestations se poursuivent dans tous le pays

Le 15 avril :

Première manifestation nationale. Le jour correspond à la date limite de remise des déclarations d’impôts. Le « Taxe-day » se transforme en « Anti-taxe day ». Près de 750 Tea Parties défilent dans les rues des villes américaines. Certaines réunissent près d’un demi-million de personnes.

Du 18 au 25 avril :

Le mouvement continue de se rassembler pour protester contre le gouvernement.

Mai et Juin 2009 :

Le mouvement se poursuit. Les revendications restent les mêmes : contre un Etat intrusif, dépensier, contre l’augmentation des impôts et de la dette de l’Etat… Le 29 juin, à Nashville, le thème de la réforme de la santé est soulevé.

Juillet-août 2009 :

Les protestations s’intensifient et se cristallisent autour de la question de la réforme de la santé.

Septembre 2009

Le mouvement continue sur sa lancée estivale. La réforme de la santé reste le sujet principal des revendications.

Le 12 septembre 2009 :

Les Tea parties participent à la « Taxpayer March on Washigton ». Plus de 70'000 manifestants, selon le Wall Street Journal, marche sur le Capitole pour protester contre les dépenses à tout-va de l’Etat. D’autres manifestations sont organisées dans tout le pays.

Octobre - Décembre 2009

Le mouvement s’essouffle un peu. Le froid aura peut-être eu raison des manifestations en pleine rue.

(Source Wikipédia)

Janvier 2010

Le mouvement reprend du poil de la bête. Une petite dizaine de manifestations sont organisées dans tout le pays.

Février 2010

Premier congrès national du Tea Party. Six cents délégués se retrouvent à Nashville. Des « workshops » sont organisés pour que le mouvement de contestation citoyen se change en une force politique capable d’influer sur les élections de novembre 2010. Sarah Palin, ancienne gouverneure républicaine de l’Alaska, est invité de marque de cette convention.

Du 4 au 7 février :

Durant la fin du mois, quelques manifestions s’organisent dans le pays contre l’augmentation des impôts, notamment.

Mars 2010

Le mouvement s’intensifie à nouveau durant tout le mois. Le 20 mars, le nombre des manifestations croît considérablement. Le Tea Party se rassemble devant la Chambre des Représentants à la veille du vote sur la réforme de la santé.

Avril 2010

Le mouvement se poursuit. Dimanche dernier encore, près de 400 personnes se sont réunies à Jefferson City dans le Missouri.

(Source Wikipédia)

Présentation des médias traditionnels

The New York Times :


Le New York Times est un quotidien américain fondé en 1851. C’est le troisième plus important journal américain après le Wall Street Journal et USA Today. Il est également le plus grand journal local du pays, bien que son tirage ait été réduit ses dernières années à un peu moins d’un million d’exemplaires par jour. En 2004, il comptait 1'124'700 abonnés quotidiens. Sa version en ligne est la plus populaire des journaux américains en décembre 2008. Plus de 18 millions de visiteurs uniques s’y sont connectés en un mois. Le journal est détenu par The New York Times Company qui publie 18 autres journaux régionaux. Son directeur est Arthur Ochs Sulzberger Jr, dont la famille contrôle le journal depuis 1896. (source Wikipédia)


Le journal comporte trois sections principales:

  • News : nouvelles internationales, nouvelles nationales, affaires, technologie, sciences, santé, sports, région new-yorkaise, éducation, temps, et annonces nécrologiques.
  • Opinion : éditoriaux et lettres adressées à la rédaction.
  • Suppléments : arts, littérature, cinéma, théâtre, voyages, guide de la ville de New York, restaurants et vins, maison, décoration et dessins.

Le Tea Party pointe au quatrième rang des sujets les plus populaires des lecteurs du New York Times, un peu après la réforme de la santé (1er rang) mais loin devant Barack Obama (9e rang).



Orientation politique : En 2007, une enquête menée par Rasmussen Reports, un institut américain de sondage, sur la perception du public au sujet des principaux médias du pays relève que 40% des interrogés estiment que le New York Times a une tendance « libérale » alors que 11% le considère comme conservateur.

En décembre 2004, dans une étude de l’Université de Californie, à Los Angeles, Le New York Times obtient un score de 73.7 sur 100, 0 étant considéré comme le plus conservateur et 100 comme le plus « libéral ». Cependant, la validité de ce travail a été mise en doute par de nombreuses organisations, notamment Media Matters for America, un groupe « libéral » d’analyse des médias.


Dans le courant 2004, l’ombudsman du journal Daniel Okrent a reconnu que le New York Times avait parfois eu un biais « libéral », notamment dans la couverture de certaines questions sociales, comme le mariage gay. Il affirme que ce biais reflète le côté cosmopolite du journal. Okrent ne commente pas le problème du biais dans la couverture de questions telles que la politique étrangère ou fiscale, les libertés civiques. Il met toutefois en évidence le manque d’esprit critique envers l’administration Bush dont a fait preuve le journal dans sa couverture de la guerre en Iraq.


On peut tout de même noter que le New York Times, en juillet 2008, refusa de publier une tribune de John McCain, alors candidat républicain à la présidence. Cette dernière répondait à une publication de Barack Obama au sujet de la guerre en Iraq. Le papier aurait été écarté car il devait être amélioré et comporté des éléments nouveaux concernant les plans de McCain pour mener les Etats-Unis à la victoire.


The Washington Post :


Le Washington Post est un quotidien américain, le plus important de la capitale. C’est également le plus ancien. Il a été fondé en 1877. Il s’intéresse particulièrement à la politique nationale, aux travaux de la Maison Blanche et du Congrès. Des éditions spéciales sont imprimées chaque jour pour Washington D.C., le Maryland et la Virginie. Le quotidien est connu pour la mise au jour par deux de ses reporters du scandale du Watergate.


L’édition de la semaine contient les rubriques suivantes :

  • Le premier cahier : la Une, les nouvelles nationales et internationales, les affaires, la politique, les éditoriaux, les opinions…

  • Metro : les nouvelles locales

  • Sports

  • Style : culture, art, littérature, cinéma, mode et rubrique people

  • Les petites annonces

Le journal appartient à The Washington Post Compagny, qui détient également The Washington Post Media, Washington Post Digital et le washingtonpost.com.


En septembre 2009, son tirage hebdomadaire moyen s’élevait à 582'844 exemplaires. Cela en fait le cinquième quotidien le plus important des Etats-Unis. (source Wikipédia)


Orientation politique : Dans son histoire, le Washington Post a été accusé de biais positifs aussi bien pour la droite que pour la gauche. Sa ligne éditoriale était plutôt de centre-gauche avant la mort de sa propriétaire Kathrine Graham. Depuis, sous la direction de son fils, Donald Graham, le journal se rapproche de la droite. Comme la plupart des médias américains, le journal a soutenu l’intervention de l’armée en Iraq en 2003. Il a également accueilli favorablement la privatisation partielle de la sécurité sociale. (source Wikipédia)


En 2007, une enquête menée par Rasmussen Reports, un institut américain de sondage, sur la perception du public au sujet des principaux médias relève que 30% des interrogés estiment que le Washington Post a une tendance libéral alors que 16% le considère comme conservateur.


En décembre 2004, dans une étude de l’Université de Californie, à Los Angeles, le Washington Post obtient un score de 66,6 sur 100, 0 étant considéré comme le plus conservateur et 100 comme le plus libéral. Cependant, la validité de ce travail a été mis en doute par de nombreuses organisation, notamment Media Matters for America, un groupe libéral d’analyse des médias.


Dans les colonnes de l’édition du 16 novembre 2008, Deborah Howell, ombudsman du Washington Post, revient sur les critiques des conservateurs qui affirment que le journal aurait un biais libéral. Elle rappelle que les journalistes, par leur envie de changer le monde, sont naturellement de tendance libérale mais que la rédaction se compose de démocrates, de républicains et de centristes. Elle affirme également que la couverture de l’actualité n’est pas biaisée par leur appartenance partisane.


Fox News Channel


Fox News Channel est une chaîne de télévision, par satellite et câblée, américaine d’information en continu. Elle a commencé à émettre en octobre 1996. Accessible à plus de 102 millions de ménages américains, elle est aujourd’hui la chaîne câblée la plus regardée aux Etats-Unis, devant CNN et MSNBC. Elle fait partie du groupe Fox Entertainment détenu en majorité par le groupe News Corporations de Rupert Murdoch. Elle émet depuis New York, 15h de direct par jour. La chaîne a connu une grande augmentation d’audience durant la seconde guerre du Golfe, près de 300%, soit en moyenne 3,3 millions de téléspectateurs par jour. (source Wikipedia)


Orientation politique : Deux nombreux observateurs estiment que le traitement de l’information et les commentaires politiques de Fox News comporte un biais en faveur des positions conservatrices. La chaîne nie. En septembre 2009, une étude du Pew Research Center montre que 72% des téléspectateurs républicains s’estiment favorables à Fox News leur est, 43% des téléspectateurs démocrates partagent cette opinion. Un sondage mené par le même institut au mois d’octobre 2009, montre que le réseau est considéré comme le plus idéologique des Etats-Unis. Les interrogés pensent qu’il est le plus souvent conservateurs à près de 43%.


En décembre 2004, dans une étude de l’Université de Californie, à Los Angeles, Fox News obtient un score de 41,1 sur 100, 0 étant considéré comme le plus conservateur et 100 comme le plus libéral. Cependant, la validité de ce travail a été mise en doute par de nombreuses organisations, notamment Media Matters for America, un groupe libéral d’analyse des médias.

Présentation des nouveaux médias

Huffington post

Il s’agit de l’un des plus importants sites d’information aux Etats-Unis. C’est également un agrégateur de contenu. Le Huffington Post attire 26.4 millions de visites uniques par mois. Selon le site d’analyse de blogs Technorati, Huffington Post est le blog vers lequel partent le plus de liens sur Internet. Créé en 2005 par Ariana Huffington en réponse à l’agrégateur d’information conservateur « Drudge Report », le « HuffPo » est rapidement devenu un phénomène de la planète Web. Certains observateurs considèrent qu’il a contribué à l’institutionnalisation de le blogosphère en empruntant au registre des médias traditionnels, notamment dans le domaine du financement. Le Huffington Post a par exemple été l’un des premiers blogs à accueillir des annonceurs. Les contributions sur le site émanent d’un ensemble de journalistes et de chroniqueurs constants, d’une part. 3000 bloggueurs de divers horizons publient en outre sur le site. Le Huffington Post propose diverses rubriques : politique, médias, business, spectacles, etc. La stratégie actuelle de sa fondatrice consiste à développer des rubriques thématiques, ainsi qu’à créer des sections locales. Les commentaires sont ouverts à tous.


Orientation politique :


Le Huffington Post dit s'inscrire dans une lignée politique « libérale » au sens où on l’entend aux Etats-Unis, c’est-à-dire non conservatrice, « de gauche ». La fondatrice du blog, Ariana Huffington, est toutefois parfois considérée comme une « opportuniste politique». Dans les années 90, elle était intimement liée à la famille politique conservatrice. (Source : http://www.hebdo.ch/huffington_post_le_blog_qui_fait_trembler_les_38547_.html). Il s'agit ici, par conséquent, de rendre attentif au fait que contrairement aux médias dit traditionnels, il n'existe pas d'études systématiques sur l'orientation politique des blogs. Ces derniers peuvent donc affirmer ce qu'ils veulent sur leur positionnement politique.


Traitement du Tea Party


Il y a une année, Le HufPo a créé un fonds pour le journalisme d’investigation. Dans le cadre de ce dernier, une collaboration a été mise en place avec Jay Rosen, l’un des maîtres à penser du « public journalism ». Ce fait dénote une forte sympathie du HuffPo pour la pratique du journalisme citoyen. Dans le mouvement Tea Party en particulier, il est intéressant de constater que le blog se positionne comme le défenseur d’un traitement compréhensif des protestations par des outils de « journalisme citoyen ». Nous verrons comment cette façon de procéder introduit un nouveau biais dans le traitement de l’information, et ses possibles conséquences.


Nota Bene


Il nous semble important de préciser ici un élément spécifique à ce média. La quantité des informations stockées sur le serveur du Huffington Post rend impossible une analyse exhaustive des diverses contributions, même avec l’aide des tags. Nous dégagerons par conséquent, pour chaque temporalité du mouvement choisie, l’orientation générale des articles et autres posts, en sélectionnant ceux qui nous paraissent les plus emblématiques.Michelle Malkin blogMichelle Malkin est une chroniqueuse conservatrice considérée comme l’un des personnages les plus influents du Web. Le site Technorati place le blog de Michelle Malkin à la 33ème place des blogs vers lequel partent le plus de liens sur la Toile. Créé en 2004, son blog traite principalement de l’actualité politique des Etats-Unis. Il s’agit par ailleurs d’un site dont l’influence est en hausse chez les penseurs conservateurs. Sur le blog de Michelle Malkin, les commentaires ne sont admis que pour les personnes enregistrées. Les contributions de Malkin nous semblent hautement pertinentes dans l’étude du mouvement Tea Party. Elles sont en effet emblématiques de la manière dont les « nouveaux médias » permettent à un mouvement de se développer, de créer un buzz. Ce blog s’inscrit dans une mouvance politique qui soutient le Tea Party, sans en être un membre organisateur explicite et direct. Le brouillage des pistes est total. Michelle Malkin jongle habilement entre les registres, sans en signaler la nature. La chroniqueuse a en outre été l’objet de critiques du Huffington Post, qui remettent en cause son récit dominant sur le Tea Party. La controverse porte sur la nature spontanée du mouvement, que le HuffPo conteste.L’un des discours récurrents chez Michelle Malkin se situe dans la manne « anti-médias d’Etat », qui ne feraient preuve d’aucune impartialité face au mouvement conservateur. Le discours est hautement idéologisé.

Tea party


Depuis le début, Michelle Malkin est unilatérale dans son traitement du Tea Party : pour elle, il s’agit d’un mouvement des bases contre la politique libérale. Le ton est donné. Il ne fléchira pas, mais se durcira, au contraire.Le site conservateur le plus important qui a relayé le Tea Party est le Drudge Report. Toutefois, Michelle Malkin est également une Malkin a également beaucoup traité du mouvement. Le Drudge Report opère en outre dans un registre sensationnaliste, alors que Michelle Malkin, une ancienne journaliste, se veut informative. Son blog nous semble hautement pertinent à analyser, car il est emblématique de tout un pan du mouvement, relayé par des blogs et plateformes de tiers, en addition d’un traitement par des sites communautaire, comme Facebook, dont nous parlerons ultérieurement.


Facebook


Après avoir analysé un blog d’une mouvance proche du Tea Party, mais qui se dit non directement impliquée lors des débuts des protestations, il nous semble essentiel de revenir à présent sur la façon dont les groupes Facebook ont également lancé l’information. Le mouvement a effectivement utilisé massivement les réseaux sociaux, ces « nouveaux médias » : blogs, Twitter, Facebook. Les protestations ont été relayées sur ces sites communautaires. Il est toutefois difficile de savoir si ces sites témoignent réellement de la spontanéité du mouvement, d’une « avant-garde » informationnelle, ou d’un élément que les acteurs mobilisent dans leur légitimation. Pour le journaliste, la manière dont un tel mouvement utilise les « nouveaux médias » est très intéressant à analyser. Les implications professionnelles qui en découlent sont en effet importantes, tant il est essentiel de lire derrière le discours des acteurs. Le danger de reprendre ces discours comme tels est inhérent aux « nouveaux médias », tant l’absence d’intermédiation suggère à priori l’ « authenticité » de l’information.Le cas de Facebook pose en effet plusieurs questions. Le Tea Party se dit spontané, politiquement non affilié, et venant de la base. Il se trouve toutefois que pour une grande partie des pages Facebook locales, la date de création ne figure pas dans les informations ouvertes au public, ou alors ne correspond pas au début du mouvement (février 2009). Il est donc difficile de vérifier si les protestations se sont réellement mises en place « spontanément », avant d’être relayées par d’autres acteurs conservateurs. Pour s’en assurer, il s’agirait de vérifier la date de création de chaque groupe local. Or cet élément s’avère impossible. A noter également que la consultation des archives du blog du Tea Party nécessite une identification.Le groupe général, de portée nationale, a quant à lui été mis en place en mars 2009, soit après les premiers balbutiements du mouvement, relayés (ou créés ?) par des personnages politiques importants, à l’instar de Michelle Malkin. Pour analyser les temporalités du mouvement qui interviennent après les premiers balbutiements, nous nous pencherons donc sur ce groupe de portée nationale. Pour ce qui est de la « mise en place » du mouvement, nous tenterons de décortiquer quelques pages ou groupes créés à chacun des moments clé des protestations.


Le ton utilisé à propos des médias « traditionnels »

Sur le site principal Facebook des différents mouvements Tea Party , le ton se veut critique des médias « mainstream », qui ne couvriraient pas de manière fidèle ce mouvement « de la base ». Le Tea Party se veut donc le défenseur des « nouveaux médias », qui permettraient une couverture plus fidèle. Il s’agit là, à notre sens, d’un discours qui légitime l’action du « mouvement », et dans lequel les frontières entre l’émotionnel, l’information, et l’auto-promotion, sont brouillées.

Début du mouvement: février 2009

The New York Times et le Tea Party : Un début médiatisé mais pas politisé

Un seul article concernant le mouvement Tea Party a été publié dans la version papier du New York Times durant le mois de février 2009, ou plus exactement faisant référence au mouvement naissant. Nous pouvons également faire mention d’une deuxième parution cette fois-ci sur l’un des blogs affiliés au New York Times. Ce dernier, que nous mentionnons uniquement à titre indicatif, fait état, dès le lendemain de sa retransmission, de l’intervention de Rick Santelli sur CNBC contre le plan de sauvetage de l’immobilier de Barack Obama. Son auteur Eric Etheridge, journaliste et photographe de son état, met en évidence des postes de réaction à la vidéo qui a été rapidement reprise sur de nombreux sites internet et vus plusieurs millions de fois en quelques jours. Il relève également que ces différentes remarques brisent l’habituel clivage républicain-démocrate.

L’édition papier du New York Times ne rapportera l’évènement que le 23 février. Il ne lui fait pas une place dans la section politique du journal mais dans la rubrique « Media & Advertising ». Dans son article, Brian Stelter revient plutôt sur une problématique née avec les nouveaux médias. Les télévisions doivent-elles héberger sur leur propre site les vidéos qui, certes, vont créer le « buzz » mais surtout montrent leurs journalistes dans des situations inconfortables? Ou doivent-elles en laisser le soin à des sites de partage d’images qui bénéficieront alors des retombées du nombre important de visiteurs. CNBC a fait son choix dans cette affaire. A peine quelques heures après sa première diffusion, en direct, la séquence se trouvait sur la page d’accueil du portail internet de la chaîne câblée. En quelque heure, elle devint la vidéo la plus populaire de l’histoire de CNBC.com. Cela a d’ailleurs poussé la Maison Blanche à répondre aux attaques de Rick Santelli. Brian Stelter fait également remarquer que le fait de poster une vidéo de ce genre sur son propre site permet de mieux la contrôler et d’afficher un avertissement pour en minimiser l’impact.

Le New York Times a donc relayé l’épisode fondateur du mouvement Tea Party sans pour autant en relever ou peut-être imaginer l’impact politique que ce dernier aurait dans les mois qui suivront cet appel de Rick Santelli.


Durant le mois suivant, deux articles ont paru sur le mouvement du Tea Party.
Le premier, daté du 3 mars et signé par Brian Stelter, revient sur l’épisode Rick Santelli. Ce dernier se défend de toute affiliation avec le mouvement. Il déclare que son intervention était spontanée. La CNBC se distancie également.

Dans le second, toujours publié dans la rubrique « Media & Advertising », il est fait mention du Tea Party mais uniquement dans une critique général du traitement de la crise économique par CNBC. La chaîne câblée y est comparé à CNN pour son travail durant la première guerre du Golfe ou Fox News durant la seconde. Le caractère politique du mouvement n’est donc toujours pas pris en compte.


The Washington Post et le Tea Party : une médiatisation plus tardive
Le Washington Post ne revient pas sur l’épisode « Rick Santelli » sur CNBC. La première mention du Tea Party dans le quotidien est faite en date du 26 mars 2009. Christy Goodman et Jenna Johnson reviennent sur un rassemblement à Solomons. Elles expliquent les origines historiques du nom du mouvement. Les journalistes donnent la parole à un manifestant, un républicain.


Fox News Channel et le Tea Party: pas de mention du soi-disant épisode « fondateur »

Nous n’avons pas retrouvé trace de l’épisode « Rick Santelli » sur la chaîne Fox News. Pour être parfaitement honnêtes, nous ne savons si c’est parce que la chaîne câblée n’a pas rapporté l’événement se produisant sur une télévision concurrente ou si la vidéo s’est perdue dans les archives, on ne peut plus foisonnantes de Fox News, son moteur de recherche n’étant pas des plus efficaces.


The Huffington Post et le Tea Party : timide apparition dans l’agenda


Durant la première moitié du mois de février 2009, le Huffinton Post se penche surtout, dans sa rubrique politique, sur les tractations au sujet du paquet de mesures de stimulation d’Obama. Les réactions des députés républicains sont également analysées. Les mouvements civiques embryonnaires qui, dit-on, se mettent en place, ne sont en revanche pas couverts. Au lendemain de l’appel de Santelli sur CNBC à la création d’un « Tea Party », le traitement du sujet par le Huffington Post est centré sur la façon dont la déclaration de Santelli a été
accueillie par la Maison Blanche. Le chroniqueur du blog Jason Linkins se penche sur la façon dont les arguments de Santelli sont déconstruits par le porte-parole de la Maison-Blanche, Robert Gibbs. Bien que les mouvements civiques qui se mettent en place ne soient pas évoqués en détail, le HuffPost met en lien la vidéo d’un groupe conservateur de « parti tiers » qui s’insurge contre l’ adoption du paquet. Le 21 février 2009, le Huffington Post évoque à nouveau Rick Santelli. Il se penche sur la relation entre Santelli et ses collègues. Quelques jours plus tard, le blog rapporte que le journaliste de CNBC s’est senti menacé par ma Maison-Blanche.

Dans les semaines qui suivent l’adoption de l’ « Economic stimulus package», le blog met par ailleurs en exergue les réactions de divers politiciens républicains. Les mouvements citoyens qui s’organisent ne sont en revanche pas relayés.


Au cours du mois de février, le Huffington Post mentionne donc à quelques reprises ce qui deviendra l’épisode fondateur du mouvement Tea Party, sans toutefois le considérer comme un événement politique. Il ne rend en revanche pas compte de l’émergence de diverses organisations de Tea Partiers.

Le 2 mars 2009, le blog consacre
un article à Rick Santelli, qui déclare ne pas avoir de liens avec le mouvement Tea Party. L’article en question est répertorié dans la rubrique « Medias », et non dans les pages politiques. La texte traite plus précisément d’une série de «protestations politiques contre le président Obama ». Ces manifestations sont brièvement mentionnées, mais le mouvement n’est pas analysé. L’angle de l’article porte clairement sur la déclaration de Santelli et le fait que son employeur, la chaîne de télévision CNBC, le soutienne dans sa démarche.

Au cours du mois de mars 2009, il est difficile de suivre l’évolution du Tea Party dans le traitement du « HuffPo ». Le serveur qui héberge les archives du blog sature en effet pour ce mois-là.


Michelle Malkin et le Tea Party : un train d’avance


Chez Michelle Malkin, la couverture du Tea Party à ses débuts est très différente de celle du
Huffington Post. La chroniqueuse conservatrice relaie déjà les protestations qui ont lieu avant l’adoption du « stimulus package » d’Obama. A ce moment-là, le mouvement ne se nomme pas encore Tea Party, mais « anti porkulus ». Dès les premières poussées timides du mouvement, le blog de Michelle Malkin se fait son porte-parole.

Le 20 février, au lendemain de l’appel de Rick Santelli à créer un Tea Party, Michelle Malkin relaie
d’autres protestations mais ne labellise pas encore le mouvement. C’est deux jours après la célèbre colère de Santelli que Michelle Malkin commence à nommer le Tea Party en tant que tel.

Tout au long du mois de février, la chroniqueuse conservatrice relaie sur son blog les différents meetings des « Tea partiers ». Elle transmet également les
informations que les internautes lui demandent de publiciser dans leurs commentaires. Il est intéressant de souligner le traitement sous-jacent des protestations par Malkin. Bien que le Tea Party dise, ne soutenir ni les politiciens démocrates, ni les républicains, Michelle Malkin insiste principalement sur le pan anti-Obama du mouvement.

Facebook : difficile d’atteindre les sources


Pour traiter des premiers balbutiements du Tea Party, il serait nécessaire que les sources premières soient disponibles. Or il se trouve que la plupart des pages Facebook des différentes villes ou régions ont été mises sur pied après février 2009. Par ailleurs, les pages Facebook qui ont été créés en février 2009 ne permettent pas de remonter jusqu’à cette date-là.

Analyse

Le traitement des débuts du Tea Party ne suggère pas de clivage entre les médias dits traditionnels et les « nouveaux médias ». Aucun des médias observés ne considère l’événement comme étant politiquement important. Soit ils ne le relaient pas, soit ils le font sous l’angle de la critique d’un phénomène médiatique. Un seul, le blog de la chroniqueuse conservatrice, Michelle Malkin, traite le Tea Party comme une force politique citoyenne. A noter encore que pour Facebook, il nous est impossible de connaître l’importance du « buzz », puisqu’il est difficile de déterminer à quel moment les groupes ont été créés. De plus, l’historique des « murs » n’est plus disponible après un certain temps.

Deuxième moment du Tea Party : les « Tax Day Tea Party Protests » 15 avril 2009:

The New York Times: un traitement minimal de l'événement

Durant le mois d’avril, nous avons pu décompter un certain nombre d’articles publiés dans le New York Times ayant pour sujet le mouvement Tea Party. Le 7 avril, est publié dans la rubrique « Opinion », une tribune de Lawrence Downes, qui revient sur un rassemblement de 300 « anti-taxe » à Northport dans l’état de New York. Le 11 avril, trois lettres de lecteurs, rédigée le 7 avril, réagissent à l’article de Lawrence Downes. Le 12 avril, Paul Krugman, prix Nobel d’économie 2008 et éditorialiste, prend la plume et se fend d’une analyse du phénomène Tea Party et des conséquences que ce dernier engendre dans la politique américaine.

Le 16 avril, le Tea Party entre pour la première fois dans les colonnes de la rubrique politique du New York Times. Un article de Liz Robbins revient sur les différentes manifestations qui ont émaillé la date limite de remise des déclarations d’impôts. Près de 750 manifestations étaient organisées dans les villes principales des Etats-Unis. Elle revient sur les motivations des protestataires, l’origine du mouvement ainsi que ses éventuelles racines républicaines. Elle insiste, notamment, sur les liens financiers qui lieraient le parti conservateur et ce mouvement citoyen qui se voudrait pourtant non-partisan. La journaliste met en évidence le soutien des différentes chaînes câblées pour l’organisation des rassemblements et pour donner de l’écho au mouvement naissant. Elle revient sur les motivations de chacun : moins d’impôts, peur du socialisme, crainte de voir les droits des Etats restreints. Certains texans demandaient même la sécession !

The Washington Post: Une légère publicité mais un traitement équilibré

Le 15 avril, Michael E Ruane publie dans la rubrique « Metro » un article sur le futur rassemblement du Tea Party au Square Lafayette. Il raconte comment les organisateurs projettent d’amonceler de sachets de thé en signe de protestation. Une autre manifestation est également prévue devant le Trésor américain. Les manifestants se réunissent pour montrer leur mécontentement vis-à-vis de l’administration Obama, accusée d’avoir plongé le pays plus profondément dans les dettes et de vouloir augment les impôts et la régulation étatique. Le journaliste interroge une organisatrice de la manifestation qui donne des précisions sur l’heure de la rencontre qui se veut également un forum pour que les citoyens puissent y exprimer leurs griefs. Les horaires de la seconde marche sont également mentionnés. Michael E Ruane évoque également d’autres manifestations agendées à Annapolis, Frederick, Reston et Woodbridge. L’organisatrice évoquée plus haut, déclare que près de 700 réunions sont prévues le jour-même dans tout le pays. Elle n’hésite pas à relever le caractère historique de cette levée de boucliers nationale

Le 16 avril 2009, Lori Montgomery rappelle dans son article que, malgré les manifestations de la veille, le poids de l’impôt fédéral sur le revenu est à son plus bas niveau depuis près de 30 ans. Elle revient sur les rassemblements de citoyens qui ont eu lieu dans tout le pays, « de Floride à Hawaï ». Elle déclare que ces manifestations ont été organisées par Freedom Works, un groupe à but non-lucratif mené par un républicain texan. Ce dernier reconnaît dans une interview accordée la veille par téléphone, que le taux d’imposition actuel est à un bon niveau. Il déclare également que peu de personnes croient que Barack Obama va se contenter de cela. Il affirme que la cible réelle de la protestation n’est pas le taux actuel d’imposition mais son augmentation sera nécessaire pour faire face au sauvetage du secteur financier, à la relance de l’économie et aux projets ambitieux d’Obama pour la santé et l’éducation. La journaliste rappelle que la Maison Blanche communiquait le jour même son message sur une baisse des impôts, incluse dans la stratégie de relance de l’économie. Certains pourraient même ne pas payer d’impôts sur le revenu.

Le 16 avril, Michael E Ruane revient sur les événements de la veille. Tout ne s’est pas exactement passé comme prévu. Faute d’autorisation adéquate, la scène prévue devant le Trésor n’a pu être installée… Le camion devant livrer les centaines de sachets de thé, symboles de la protestation s’est perdu et, une fois son chemin retrouvé, la municipalité n’a pas accordé le droit aux « Tea partiers » de les déposer dans le parc comme prévu initialement. Il a plu et finalement la police a évacué le parc devant la Maison Blanche lorsque des manifestants avaient jeté une boîte de thé sur la façade de la célèbre bâtisse. Il n’hésite pas à qualifier la Tea Party made in 2009 de comédie. Cependant, il reconnaît que des centaines de manifestants étaient tout de même présent au Square Lafayette, nonobstant les problèmes d’organisation. Le journaliste donne la parole aux protestataires. Il rappelle les revendications du mouvement et constate qu’il s’est étendu à de nombreuses villes du pays. Il revient également sur la baisse du taux d’imposition annoncée par la Maison Blanche et qui devrait concerner près de 95% des travailleurs américains.

Le 16 avril, Dana Milbank, éditorialiste du Washington Post, publie un article qui revient sur le traitement de l’événement de la veille par Fox News, notammant. Il revient sur le fait que la chaîne a activement fait la promotion des manifestations de la veille. Il décrit également le comportement de certains de ses analystes qui semblaient très favorables au mouvement tout en rappelant le slogan de Fox News : « Fair and balanced ». L’analyste aurait déclaré : « vous savez ce que veut dire « fair and balanced » ? Cela veut dire que nous transmettons notre message et que nous compensons leur manque de message », alors que l’image à l’écran montrait un groupe de contre-manifestants. Des manifestants pro Tea Party arborait même des messages de remerciements à la chaîne d’information. L’éditorialiste relève que le rassemblement, au-delà des protestations contre les impôts, ressemblait à un festival anti-Obama. Il donne un certain nombre d’exemples de placards à son intention, de plus ou moins bon goût.

Le 17 avril 2009, Steven Pearlstein, revient dans un article publié dans les colonnes de la rubrique « Financial » sur les déclarations d’un leader du mouvement anti-taxe selon lesquelles le taux d’imposition serait « à un juste niveau ». Il raille Dick Armey en saluant le fait qu’un républicain ait osé reconnaître que les impôts avaient été suffisamment abaissés et que le taux optimal d’imposition n’était pas zéro. L’éditorialiste admet que ce dernier a raison sur un point supplémentaire : les projets du président Obama devront forcément être soutenus par une hausse des impôts si le budget doit être équilibré. Il critique la politique fiscale aussi bien des démocrates que des républicains. Reprochant aux premiers de faire payer aux citoyens les changements qu’ils veulent entreprendre dans le pays et aux seconds, de voir les réductions d’impôts comme un élixir magique, une réponse à tous les problèmes.

Le 19 avril 2009, Dan Balz publie un article dans lequel il affirme que le Tea Party représente une opportunité et un risque pour le parti républicain. Une opportunité car il donne une décharge d’énergie à un parti battu après deux élections peu enlevées. Un risque car il ne fournit au mieux qu’une réponse partielle à ce qui inquiète le parti républicain. La colère n’est pas une stratégie politique. Il revient sur les autres mouvements contestataires qui ont porté le parti républicain à la Maison Blanche : la Proposition 13, en 1978 et la coalition anti-gouvernementale dans le début des années 1990. Le journaliste pense que les manifestations du Tea Party offre une bouée de sauvetage au GOP. Il ne sait pas très bien si c’est une mise en évidence de quelque chose d’ancien ou le début d’une nouvelle ère. Le poids des arguments républicains comme la réduction des impôts ou un gouvernement réduit a perdu de son intensité avec les échecs des années Bush et la crise économique. Peuvent-ils revenir sur le devant de la scène ? Cela dépendra pour beaucoup du succès ou de l’échec de la politique économique de Barack Obama. Pour Dan Balz, traîner les pieds et dire non à Obama peut être suffisant pour l’instant. Mais l’opposition à la politique du président représente un message incomplet pour un parti qui cherche à regagner le pouvoir. Les républicains doivent toujours se confronter aux questions suivantes : comment être attractif au niveau national et comment dirigeront-ils le pays si l'occasion leur est donnée à nouveau ?

Le 19 avril, Dana Milbank revient dans un commentaire sur les réactions qu’ont suscitées sa critique de la manifestation du Tea Party devant la Maison Blanche. Il déclare que des conservateurs ont laissé des centaines de commentaires indignés à son propos, affirmant qu’il était à la botte d’Obama. Cet article ne lui a pas non plus attiré la sympathie de la gauche. Ses partisans semblent également déçus par la politique centriste de Barack Obama.

Dans un article du 19 avril, David Ignatus, éditorialiste, voit les rassemblements du Tea Party comme le signe d’un parti républicain peinant à se renouveler et ignorant le désir du peuple de voir au pouvoir un gouvernement actif qui résout les problèmes.

Fox News Channel: Publicitaire dévoué du mouvement Tea Party

La chaîne a largement promu l’organisation des manifestations du « Tax-Day » aussi bien dans ses programmes que par de la publicité. Elle a, à plusieurs reprises, encouragé les téléspectateurs à s’engager. Media matters for America a réuni dans un clip certains moments importants de la promotion du Tea Party par Fox News aussi bien avant le 15 avril que le jour même.

La veille des rassemblements, Fox News a consacré près de 10 min de son émission « News Live Desk » en direct à l’annonce des manifestations du « Tax day », donnant la parole à des organisateurs. Un animateur a également été invité. Il a osé faire remarquer que le gouvernement de Georges W. Bush avait considérablement limité les libertés personnelles des Américains, l’animatrice, Matha MacCallum, a réagi plutôt agressivement.

Le soir même, entre 20h et 21h, les manifestations sont le sujet principal du O’Reilly Factor, une émission politique animée par Brian O’Reilly. Dans son introduction, il rappelle que Barack Obama a été élu son « entitlement plans », donc qu’un certain nombre d’Américains demande une intervention plus importante de l’état. Il reconnaît également que certains payeront moins ou pas d’impôts sur le revenu. Il estime toutefois que les manifestations sont nécessaires, au même titre que le débat sur la taille du gouvernement. Il déclare que le système fédéral de taxation favorise les travailleurs mais pas au niveau de l’état. Il montre sous le titre « Taxation nation », les augmentations de taxe des différents états pour contrebalancer les dépenses. Il fait le lien entre ces dépenses et les coûts de la santé. Il déclare que les entreprises quittent les états qui augmentent les taxes. Il affirme que les Américains qui pensent que l’intervention de l’Etat doit être limitée à sa portion congrue ont des arguments que les médias « libéraux » refusent d’entendre. Il attaque le traitement des manifestations par le New York Times et la NBC. Il accuse deux journalistes d’être corrompus et de contrevenir au bien-être de la nation.

Huffington Post : Intense couverture et « journalisme citoyen »

En avril 2009, à l’aube des « Tax Day Tea Party Protests » , le Huffington Post commence à couvrir le mouvement Tea Party d’une manière subitement intense. Les 14 et 15 avril, le Huffington Post réserve une couverture intense au mouvement, sous divers angles. Accusé de faire l’impasse de ce « mouvement citoyen » par les médias conservateurs, le Huffington Post met en place une plateforme de journalisme citoyen, qui fait intervenir 1600 reporters. Dans le ton utilisé, il devient limpide que le Huffington Post cherche à se défendre des accusations de partialité, et invoque un registre de légitimation souvent utilisé par les médias nord-américains : le mythe du journaliste-témoin non engagé.

En tant qu’agrégateur d’information, le Huffington post renvoie également, lors de la couverture des protestations, à d’autres médias, parfois de mouvance politique opposée, à l’instar de Fox News. Les moyens et la grandeur du « HuffPo » permettent un traitement en profondeur des « Tax Day Tea Protests » , ainsi qu’une immédiateté. Une partie des chroniqueurs traite du Tea Party comme d’une mouvance extrémiste de droite, anti -Obama, . Le « HuffPo » octroie cependant également une place aux commentaires des mouvances politiques opposées, notamment par la mise en lien des vidéos Youtube des « Tea partiers ».

Le 15 avril, par ailleurs, l’une des chroniqueuses remet en question pour la première fois le narratif des défenseurs du Tea Party, qui présentent le mouvement comme un élément spontané venant de la base.

Les jours qui suivent le « Tax Day Tea Party Protests », le Huffington Post offre toujours une couverture intense du mouvement. Etant donnée la variété des sources et les liens proposés, il est impossible de donner une liste exhaustive des textes, images et sons du « HuffPo » et de leur contenu. Il est néanmoins possible d’en citer quelques-uns :

- Le blog continue à offrir une couverture émanant du « journalisme citoyen », qui adopte, par Flickr, Twitter, ou d’autres supports, plutôt une vision proche du mouvement. Tout en en se targuant d’une couverture « neutre », issue des citoyens, factuelle et non filtrée, le « HuffPo » propose par ce support « citoyen » une vision du Tea Party très proche des techniques de marketing politique du mouvement lui –même. Ce fait est hautement intéressant à observer pour un média de réputation libérale. Il souligne également toute l’ambiguïté des « nouveaux médias », qui jouent sur plusieurs registres, tant émotionnels que « factuels ». Il montre en outre comment un rapport de faits sans intermédiaires peut s’apparenter à de la promotion politique non clairement énoncée.


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Source, Huffington Post: http://www.huffingtonpost.com/2009/04/15/tea-party-photos-tax-day_n_186752.html

-Les chroniqueurs observent sous plusieurs angles le renforcement de ce mouvement politique, qu’ils identifient clairement comme tel. La plupart des chroniqueurs qui publient sur le site du Huffington Post ont une orientation « libérale » et remettent en question le caractère spontané des manifestations. Plusieurs affirment que Fox News nourrit le « Tea Party ». Il est également fait état des débordements du mouvement, est de son caractère extrémiste. Ce pan de chroniques fait également appel au matériel posté sur les sites communautaires et autres « nouveaux médias ». Contrairement à la plateforme de journalisme citoyen, les chroniqueurs traitent ce matériel traite comme une matière première à analyser, non comme une information « qui parle d’elle-même ».

-D’autres observateurs du Huffington Post, enfin, commentent la manière dont certains politiciens républicains surfent sur la vague du Tea Party dans le cadre de leur propre agenda politique.

Michelle Malkin

A l’aune des manifestations du 15 avril 2009, le soutien explicite de Michelle Malkin se fait de plus en plus assidu, et de plus en plus inventif. Le 13 mars, la chroniqueuse conservatrice met un post dans lequel elle compare le « Tea Party » à la lutte de Gandhi. Elle commence son texte par une citation du grand leader pacifiste : “First they ignore you, then they ridicule you, then they fight you, then you win.”. Michelle Malkin fulmine contre les allégations des opposants au Tea Party, qui qualifient, selon elle, le mouvement citoyen de « conspiration ». Elle défend en outre le mouvement des accusations selon lesquelles il ne pas faire intervenir de personnes de couleur. Par ailleurs, Michelle Malkin met en lien plusieurs sites conservateurs de sympathisants du mouvement, notamment celui du parti républicain du Tennessee. (Notons que le Tea Party se dit ni démocrate, ni républicain)

Le 14 avril, Michelle Malkin déclare qu’elle se rendra au Tea Party de Sacramento. Elle met de plus en lien une fabrique de thé qui se dit solidaire du mouvement. Elle met également en lien certains sites qui somment d’arrêter la propagande de gauche. D’autres sites qu’elle mentionne donnent une carte complète des manifestations. Les sites qu’elle met en lien citent également son blog. Il s’agit véritablement, à ce stade, de la mise en place d’un réseau solide de sympathisants du mouvement.

Dans un autre post du 14 avril, Michelle Malkin enjoint les manifestants d’être attentifs à ceux qui essaieront de perturber le mouvement.

Le jour J, la chroniqueuse poste un texte qui retrace la genèse du mouvement. Il s’agit du post auquel réagira le Huffington Post, en remettant en question le caractère spontané du mouvement.

Le même jour ; Michelle Malkin poste un lien sur le Twitter du movement

Après le « Tax Day Tea Party Protests », au cours duquel elle est intervenue, Malkin écrit sur son blog également un texte dans lequel elle critique certains républicains, en plus des posts dans lesquels elle félicite le rassemblement. Selon elle, ses opposants et les opposants du Tea Party omettent ce fait

Avant et pendant les manifestations du 15 avril 2009, Michelle Malkin promeut donc activement le Tea Party, et critique avec véhémence les « libéraux ». Elle essaie en outre de suggérer que les protestations se situent dans une mouvance « ni démocrate, ni républicaine ».

Facebook

Les archives de la page générale Facebook du « Tea Party Patriots » ne remontent pas plus loin que juin 2009.

Une page Facebook, Washington DC Tax Day Tea Party, existe en revanche. Elle propose une carte précise des différentes organisations, ainsi que des événements en cours. Elle précise que le mouvement est non partisan, et qu’il émane d’une réaction spontanée contre le sauvetage des banques et l’adoption du « Economic Stimulus Package ».

Récemment, ce groupe met un lien pour prévenir ses membres qu’une page « Crash the Tea Party » a été mise sur pied. Le ton est alarmiste et très défensif. Les « Tea Partiers » se défendent avec véhémence contre les accusations qui les poursuivent, à savoir qu’ils font partie d’un un mouvement extrémiste, violent, et raciste. C’est ce qui ressort également du blog du « Tax Day Tea Party ».